Travailler ensemble : du temps et des moyens

Les sciences appliquées, de par leurs besoins, créent de nouvelles théories mathématiques. Pourtant, beaucoup regrettent le peu de liens avec les mathématiciens, « difficiles à intéresser ». Les méthodes mathématiques sont elles-mêmes peu diffusées vers les applications. Des problèmes de valorisation sont ainsi pointés du doigt, notamment l’ANDRA souligne que « trop peu encore de ses recherches menées en collaboration avec l’académie deviennent opérationnelles ».

Plusieurs causes sont mises en évidence. La communication est rendue difficile par les différences de vocabulaire et de dialogue, mais aussi de centres d’intérêts. De plus, les projets ANR de 3 ans sont trop courts pour établir un dialogue, et poser un problème qui intéresse les deux (voire trois) communautés. De telles collaborations demandent nombre d’essais infructueux, du temps et des efforts. à ceci s’ajoutent des difficultés d’évaluation des projets et des recrutements interdisciplinaires. La France est peut-être une exception, car aux États-Unis ou en Angleterre les disciplines ne sont pas cloisonnées en UFR et il y a plus d’enthousiasme et de curiosité entre les différents experts. En France, la déconnexion entre disciplines n’aide pas au mélange et aux interactions.

Ceci dit, même si plus d’interactions favorise la création d’idées, il ne faut pas négliger les efforts et le non conservatisme nécessaires pour travailler réellement ensemble. Chaque chercheur doit rester centré sur sa thématique mais un équilibre est à trouver entre cette nécessité et la transversalité des mathématiques dans les applications. Regrouper géographiquement des individus, avoir une masse critique de compétences diverses, est nécessaire pour redonner du sens au travail d’équipe. Mais, avant tout, la première étape est la volonté des personnes à travailler ensemble et la reconnaissance de la communauté.

Le transfert des méthodes vers l’opérationnel même s’il comporte beaucoup de développement est primordial pour valoriser la recherche. Il faut aussi favoriser la mise à disposition de développements interopérables et réutilisables et permettre l’accessibilité des données à la communauté scientifique afin d’améliorer la capitalisation des résultats. INRIA est une grosse structure qui fait des efforts dans ce sens, mais il manque sérieusement d’organismes intermédiaires à taille plus réduite, proche des universitaires. Notons, les initiatives des alliances ALLenvi et ALListene, ainsi que la création de Maisons de la simulation comme celle de Paris, ou MaiMoSiNE de Grenoble, de bonnes idées qui ne doivent pas se transformer en musées et ne doivent pas se baser uniquement sur le dynamisme de quelques personnes volontaires risquant de se fatiguer à la longue. De vraies directives et choix sont à prendre et il faut y mettre les moyens. Notamment, les besoins de postes pérennes en personnels administratifs et en ingénieurs sont importants.

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